Evangélisation

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INTERVIEW AVEC ELSBETH FONTAINE


Quand vous étiez petite, que vouliez–vous devenir ?

Fermière ou missionnaire. Fermière, parce que je me suis toujours sentie proche des animaux et de la nature. Je pouvais passer des heures à l’extérieur, près des vaches, des chiens, des poules, etc. sans jamais m’ennuyer. Leur présence me comblait de manière inexplicable.
Et missionnaire, parce qu’à l’école du dimanche, où j’allais régulièrement, on nous parlait d’enfants vivant dans une extrême pauvreté en Afrique et en Chine… Cela faisait naître en mon cœur une telle douleur que je voulais à l’âge adulte partir vivre avec eux comme missionnaire pour partager leur misère.

Quel genre de musique aimiez-vous avant et après être devenue chrétienne ?

Avant : tous les styles ou presque et après, pareil… Dans notre famille nous n’écoutions pas un seul style de musique ; ceci explique sans doute ma grande ouverture dans ce domaine. J’aime le rock, le blues, le jazz, les chansons allemandes, la musique folklorique, la country, le classique, le rap, etc.

Avez-vous reçu une formation musicale ?

Oui, en famille et plutôt sur le tas. Nous n’arrêtions pas de chanter ensemble, mes parents, mes sœurs et mon frère et de danser, de faire des spectacles entre nous, etc. On avait une chanson pour chaque saison et pour chaque situation. S’il arrivait qu’un enfant soit fâché ou triste, la famille lançait une chanson de circonstance et la tristesse s’envolait aussitôt.
Une de mes sœurs apprenait la guitare et mon frère s’initiait à l’accordéon. Je désirais, moi aussi, jouer de ces deux instruments, mais sans passer par de longues heures de leçons… ils m’ont montré les accords que j’ai ensuite transmis à d’autres et ainsi de suite.
La musique et le chant étaient pour nous un moyen d’expression et de communication idéal, un peu comme la parole. C’est pourquoi j’avais du mal à comprendre pourquoi on considère les musiciens et les chanteurs comme des stars… S’il en est ainsi, chacun peut être une « star » puisque chacun parle.

Quel est votre plus beau souvenir de concert ? Et le plus mauvais ?

Au cours d’un culte concert, j’ai invité les gens à venir sur la scène pour danser avec moi… Des enfants et des personnes âgées se sont avancées et nous avons dansé et chanté ensemble devant Dieu. La vieillesse et la jeunesse qui se confondent et se montrent simplement comme des êtres merveilleux se réjouissant ensemble, cela me donnait un avant-goût du ciel. Quant à mon plus mauvais souvenir, je ne me souviens plus.

Par quel moyen désiriez-vous atteindre le plus de monde possible ?

J’aimerais que ça se passe comme au temps des premiers disciples. Une fois que Jésus est retourné au ciel, les disciples et leurs familles étaient tous réunis à Jérusalem, remplis de la puissance de l’Esprit de Dieu pour raconter ce qu’ils avaient vécu avec lui. Leur amour était tellement fort que personne ne restait seul avec ses besoins. Il est écrit qu’ils mangeaient ensemble dans la joie et la simplicité. La foule, voyant des gens aussi simples accomplir des miracles et proclamer la bonne nouvelle avec une telle conviction, était stupéfaite et voulait croire, elle aussi. Plus de 5000 personnes se sont ajoutées aux croyants en deux jours. Voici mon désir : Une foule venir à Dieu, parce qu’elle découvre notre amour, notre simplicité et la puissance de Dieu qui agit en nous, pour libérer tous ceux qui se sentent prisonniers du mal.

Dans la Bible, quel est votre personnage préféré ?

Tous, ou presque, mais je vais citer deux : le roi David et Marie, la mère de Jésus. Ils ont quelque chose en commun qui me fascine : leur audace imprégnée d’amour pour leur Dieu et la justice et aussi leur haine contre l’injustice. On ne trouve chez eux ni orgueil, ni fausse humilité, même si leur attitude dans certaines situations peut laisser supposer de l’orgueil.

C’est intéressant, expliquez-nous.

Regardez le jeune David :
D’avoir osé dire à son peuple de cesser de trembler devant le géant Goliath, en annonçant haut et fort qu’il allait le combattre, franchement c’était un peu gonflé, non ? Pour qui se prenait-il ? En fait, il était tout simplement libre de fausse humilité et prêt à foncer. Parce que d’après lui, on ne se moque pas du vrai et unique Dieu, comme ce « faux puissant » Goliath le faisait. David était aussi libre d’orgueil, puisque dans ses psaumes on n’arrête pas de l’entendre avouer qu’il n’est moins que rien sans son Dieu, jusqu’à même se comparer à un verre de terre face à Dieu.

Quant à Marie on pourrait penser :
Quel toupet d’avoir osé chanter, « je me réjouis en Dieu, car il a fait de grandes choses pour moi, désormais les générations entières vont m’appeler Bienheureuse » ou encore: « Dieu a renversé les puissants de leurs trônes pour nous élever, nous les humbles.» Pour qui se prenait-elle ? Ses paroles ne sonnent pas très modestes, d’autant plus qu’elle ose afficher un certain « malin plaisir » envers ceux qui rejettent Dieu.
Comme David, elle est exempte de fausse humilité puisqu’elle désire la gloire par et pour son Dieu. Elle n’a pas honte de donner libre cours à la joie, en s’imaginant les « faux puissants » sur le point d’être détrônés. Marie n’avait pas d’orgueil, car lorsque les gens voulaient lui donner trop d’importance, elle leur disait : « Faites ce que Jésus vous dira.» En d’autres termes, «ne venez pas à moi, je ne peux rien pour vous, si ce n’est vous envoyer vers le Sauveur.» Marie et David sont de grands exemples pour moi. Je me réjouis déjà de les rencontrer au ciel.

Qu’est-ce qui vous motive de chanter ?

Mon amour pour la vérité et ma haine du mensonge. Et aussi ma compassion pour l’être humain qui se fait continuellement piéger par le « père du mensonge ». Car je constate à travers les medias, que les vraies valeurs sont chassées en proposant tant de faux bonheurs. Ce constat me motive à fonds de chanter les vérités de Dieu.

Qu’est-ce qui vous empêche de chanter ?

De partir loin de ma famille - ceux qui font partie de la « tribu » et des personnes que j’aime, mais aussi de ma maison, l’abri où je vis. Vous savez, je suis une grande cafardeuse. Il m’arrive aussi de trouver tout nul, ma voix, ma présentation, etc. et je n’ai plus envie de chanter. J’entends alors la douce voix de Jésus au fond de moi : « Souviens-toi de quel gouffre je vous ai tirés, toi et ta famille, va le raconter à d’autres ; jette la bonne semence de l’espoir partout, tant qu’il est encore possible de le faire. » Alors c’est reparti de plus belle…

Avez-vous traversé des épreuves ?

Pendant une dizaine d’années, les coups durs n’ont pas arrêté de s’abattre sur notre famille, touchant l’un après l’autre. A tel point que, souvent, je me trouvais littéralement paralysée par la peur. Il y a eu entre autres le problème d’alcool de mon mari, qui témoigne dans un livre. Souvent je m’adressais à Dieu avec mes cris de désespoir : « Pourquoi tous ces coups ? N’es-tu pas un Dieu d’amour ? »
J’ai fini par douter de tout. J’ai arrêté de croire à l’amour, au couple, à la famille, à la joie, et même à la sincérité des gens, qu’ils soient croyants ou non. J’en arrivais au point d’être persuadée que chacun au fond de lui-même est tordu, qu’il le veuille ou non, moi y comprise. Ma peur de devenir folle s’est changée en désir de le devenir vraiment.
Le fait de ne plus trouver de simples bonheurs, ni dans le monde ni même dans l’église, me donnait le vertige. Je devenais insensible aux choses qui m’entouraient. Tout me semblait vanité des vanités.

Comment vous en êtes-vous sortie ?

C’est une longue histoire, j’essaie de la résumer.
Une seule chose me paraissait encore sensée : prendre Dieu « au mot », en quelque sorte le tester, pour voir si sa parole dit vraiment la vérité ! Comme j’avais l’impression que le fondement de mon existence s’effondrait, il me fallait trouver plus que jamais, un appui solide et inébranlable. Comme la Bible est un livre « pratique », l’unique moyen de vérifier si elle dit vrai, était de la mettre en pratique. Voilà ce que je devais faire. Mais cela m’angoissait, car depuis ma jeunesse je m’étais efforcée de mettre en pratique cette parole, or je voyais ma famille se détruire quand même… L’idée de tout recommencer me paniquait ! Mais comme je doutais davantage du monde, des religions, des gens et de moi-même que de la parole de Dieu, mon choix fut vite fait : J’ai décidé de recommencer avec Dieu ! J’ai donc veillé (avec peine) sur la maison, les enfants, je suis allée à l’église, j’ai fait des visites à l’hôpital et dans les homes, j’ai fait du porte à porte, etc. sans le moindre sentiment de joie ni d’amour pour les gens, simplement parce que Dieu dit : « Celui qui m’aime, c’est celui qui met en pratique ma parole. »
A ce rythme, je me demandais parfois si je ne devenais pas « maso », mais tant pis, j’étais en train de prendre Dieu au mot ; et si avec tout cela je devais perdre pour de bon tout réel plaisir, ce ne serait pas ma responsabilité. J’aurais au moins essayé jusqu’au bout, j’aurais pris tous les risques. Puis à un moment donné, à ma grande surprise, une nouvelle dimension dans ma relation avec Dieu s’est ouverte… Un voile sur mes yeux s’est levé pour tout saisir, comme jamais auparavant. C’était un bonheur inexplicable !
Le Dieu d’amour m’a fait passer dans la fournaise (sans pitié) pour dégager et libérer une poussière tenace, étouffant la vraie foi en moi. Cette poussière était mon « besoin » de voir et de sentir pour croire. J’ai compris que la vraie foi n’a besoin de rien d’autre qu’une parole venant de Dieu ! Grâce à son « silence », me faisant réaliser cette dépendance, j’ai pu lui demander pardon et Dieu a anéanti cette poussière. Dès lors je pouvais simplement me réjouir en lui et le louer. Souvent j’arrivais à rire de bon cœur, bien qu’étant encore en pleine détresse.
Libérée de toute dépendance, la foi était prête à l’action. Les ténèbres devaient fuir et elles ont fui, et ma famille s’est rétablie miraculeusement ! OUI la parole de Dieu est vraie, juste, efficace, solide comme un roc, hier, aujourd’hui, demain et pour toujours, point -
Il m’arrive de trembler encore, mais le rocher sur lequel je me tiens ne tremble pas. Je l’ai testé, je sais de quoi je parle…

Que conseilleriez-vous aux chrétiens qui traversent des épreuves ?

Surtout ne gardez rien pour vous ! Videz devant Jésus votre sac de doutes, de peurs, de questions, de colères, de frustrations, etc. N’ayez pas peur de lui demander pardon et de vous humilier pour ce que vous avez reconnu comme étant votre faute. Il désire faire un premier nettoyage et celui-ci passe généralement d’abord par soi-même. Ainsi l’esprit de Dieu, la vérité, est libre d’agir. Ensuite restez accroché envers et contre tout à Jésus et à sa parole, comme les êtres les plus têtus et bornés (pour cela c’est permis, voire conseillé) au monde.

Comment êtes-vous devenue chrétienne ?

Petite déjà, j’avais l’habitude de m’adresser à Jésus pour absolument tout. Cela me rendait folle de joie et me faisait croire que j’appartenais à une famille très riche, alors que nous manquions souvent d’argent. Nous vivions une foi simple, naturelle et profonde en un Dieu puissant et bon. Partout, à l’école et à la récrée je fredonnais les chants de Dieu, de Jésus, que nous chantions à la maison et je les apprenais à d’autres. Mais très vite on a commencé à se moquer de moi, et même à s’irriter en lançant à Dieu, devant moi, les pires injures. Sans rien comprendre, je me demandais en quoi il était mal de chanter l’amour de Dieu ?
J’ai fini par en avoir assez de ces moqueries et vers l’âge de 13 ou 14 ans, j’ai décidé de vivre comme ceux qui ne connaissent ni Dieu, ni ses commandements. Je craignais rater quelque chose dans le monde. Je voulais moi aussi vivre le frisson de l’interdit, la passion et le goût de l’aventure. J’imitais ceux qui se conduisaient comme leur propre chef, en mettant ma confiance dans ma seule volonté. Mais je ne voulais en aucun cas perdre Jésus, car mon bonheur avec lui était bien trop réel. Je l’ai alors caché au plus profond de moi, pour ne plus parler et chanter de Jésus ; « bien fait pour eux ! »
Succès et réussite sont arrivés aussitôt. On ne s’est plus moqué de moi, au contraire : j’avais des admirateurs partout. Ma confiance en moi allait en grandissant et me poussait toujours plus loin, jusqu'à briser les règles de l’école, etc. Sournoisement, ma volonté est devenue mon nouveau Dieu. Le temps passait et très vite je commençais à me lasser de ces succès. La passion et la « fièvre » de l’aventure ont disparu, ne restait que la réussite. J’ai alors ressenti la peur de ma vie! Je réalisais avec horreur qu’il est possible de vivre une constante réussite, tout en s’ennuyant à mort à l’intérieur de soi. Ce prix, NON, je n’étais pas prête à le payer. Sans hésiter, je me suis tournée à fond vers Dieu ou plutôt, je suppliais Jésus de sortir du lieu, à l’intérieur de moi, où je l’avais si bien et dangereusement caché. J’avais trop peur que cette fois ci, loin de lui, hors de sa volonté, je rate le meilleur qu’un être humain puisse vivre ! J’avais 16 ans.

Quand vous chantez, à qui vous adressez-vous, à Dieu ou aux personnes du public ?

Quand je m’adressais uniquement au public, quelque chose ne passait pas. Comme je ne connaissais pas les attentes et besoins des gens devant moi, mes pensées se dispersaient et la peur me bloquait. Alors que j’étais prête à tout laisser tomber, une petite voix me disait : « Chante uniquement pour moi, exprime ta reconnaissance envers moi, comme tu aimes à le faire quand tu es seule ; au lieu de le faire devant les meubles sans vie, tu le fais devant des êtres vivants. »
J’ai essayé et, ô miracle, cela fonctionnait et tout passait ! En ne m’adressant qu’à Jésus, toutes les voies de la communication se sont ouvertes !

À part la musique, avez-vous d’autres plaisirs ?

J’en ai tellement ! Lire, écrire, cuisiner, philosopher, jouer à la coiffeuse, nager, skier, patiner, me balader à la campagne avec ma vieille et adorable caisse (voiture), déguster des cafés dans des restos sympas en feuilletant le journal pour y glisser un de mes traités, aller à la découverte de lieux et maisons abandonnés, surprendre les gens par ma visite, faire de la moto avec mon mari, paresser, m’amuser avec mes enfants et petits enfants, rêver, imaginer l’impossible…

Quels sont vos chants préférés parmi ceux que vous chantez ?

Tous ! Cela dépend des circonstances dans lesquelles je me trouve. Le chant « ses mains » que j’aime beaucoup, évoque la croix et me fait à chaque fois frémir. Malgré que Jésus ait fait tant de bien avec ses mains, on les a clouées sur une croix… Mais on le sait, c’était prévu pour le salut de l’être humain. Quel bonheur, le moment où je pourrai voir ces mains de près !
Un chant que j’apprécie aussi c’est : « Que je l’aime » et qui dit : « Il y a des jours ou ça ne va pas, j’ai le moral en bas, je ne comprends plus rien, j’ai envie qu’on me fiche la paix, mais ça ne fait rien, je veux quand même chanter que je l’aime. »
L’amour de Dieu pour moi est comme la respiration : elle ne s’arrête pas quand tout va mal, donc moi non plus, je n’arrête pas d’exprimer mon amour en chantant que je l’aime, peu importe si je me sens bien ou mal.

Il vous arrive encore de douter ?

Sans doute ! Je doute tous les jours. Je doute jusqu’à douter de mes doutes et alors je me trouve à nouveau dans la foi. Mais je ne vous cache pas que cela prend parfois énormément de temps…

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